Comment m'étais-je retrouvé là ? Il faisait nuit, j'avais froid et j'étais dans un des quartiers les plus mal famés de Londres ! On pourrait se demander qu'est-ce qu'une noble de treize ans à peine faisait dans ce genre de quartier. Eh bien...

Un garçon m'a invité au restaurant. Il devait avoir quatorze ans environ. Je me demande ce qui m'avait pris d'accepter son invitation ! C'était un garçon ! Pourquoi j'avais accepté ? J'aurais du trouver une excuse pour rejeter sa demande. Mais sur le coup, je n'avais pas pu refuser. C'était demandé avec tellement de galanterie. Et puis, cela aurait paru douteux si je refusais. C'était un beau garçon de la grande noblesse et je n'étais pas fiancé. Qu'est-ce qu'on aurait pensé ? "Ah la la ! La jeune Charlie Rozen n'est pas fiancée et se permet de refuser une telle invitation ! Soit elle est stupide soit elle est homosexuelle ! Elle va finir vieille fille ! Elle fait honte à la Maison Rozen !". Bref.
Et sans trop d'explication, après le dîner, il m'avait laissé en plan alors qu'il était sensé me raccompagner à mon manoir.
Du coup, je devais me débrouiller tout seul pour rentrer. J'avais erré. Longtemps. J'allais de café en café pour demander s'ils disposaient d'un téléphone pour appeler chez moi. Le peu de café qui était encore ouvert n'en avait pas pour la plupart.
Et sans trop savoir comment, je m'étais retrouvé ici.

Je vagabondais donc dans la rue. J'avais peur. Je tremblais. Puis, je vis un pub. Je pensais que cela valait mieux d'entrer que de rester dehors. Donc j'entrai. Il y régnait une forte odeur d'alcool bon marché. Dès mon entrée, toutes les personnes présentes, à savoir que des hommes, me dévisageaient. Certain avait un sourire qui n'inspirerait confiance à personne.
Il était vrai que je contrastais avec l'environnement. Je portais une belle robe du soir rose pâle avec beaucoup de dentelle et de détail et au dessus, je portais un manteau blanc nacré très élégant. J'avais les cheveux attachés avec des rubans blanc en deux queues de cheval hautes.
Je demandais au barman:

- Excusez moi, Monsieur, n'auriez vous pas un téléphone s'il vous plait ?

- Non m'zelle ! me répondis le barman. C'n'est pas ici qu'vous en trouv'rez un !

Bien sûr. Je devais m'en douter. Je n'étais pas rassuré du tout ! Meman avait raison ! Jack avait raison ! Emiko avait raison ! Je n'aurais jamais dû sortir tout seul ! Je ne savais pas ce que je faisais ! J'étais incapable de me débrouiller tout seul !
J'entendais des hommes murmurer derrière mon dos. Ma fierté me poussa à me retourner et à les regarder hautainement. Ce n'était pas la chose la plus intelligente à faire en ce lieux... Mais j'avais de la chance dans mon malheur, ils ne vinrent pas me régler mon compte. De toute façon, je ne pense pas que j'avais l'air très menaçant...

J’avais passé ma soirée et ma journée comme les autres ; à me balader dans les rues de Londres sans aucun but, ni raison. Mes pas me guidaient aléatoirement dans la ville ; par moment, je mangeais de la viande. Je ne sais comment mais j’en trouvais tout le temps. A d’autres, je m’éveillais sans me souvenir d’où j’étais. Ma vie était errance depuis mon départ de chez Ma…Mademoiselle Lane. Mes yeux prirent une teinte sombre à l’évocation de ce nom. Je m’engageais dans une ruelle sombre tandis que le vent froid fit claquer le manteau usé et dévasté ; un cadeau de ma vielle amie la duchesse Hope. Voilà un moment que je ne l’ai vue. Elle me manque parfois. Mon corps bouscule un homme, qui détale en me fixant. Ses insultes moururent dans sa gorge. Cela me ramène un peu sur la réalité. Ce soir-là et après tant de jours d’absences, je me décide enfin à revenir dans ce monde tangible et à ne plus errer en suivant des spectres comme Alina.

Mon pas se fait plus sur tandis que je reprend un peu du poil de la bête. Première étape, soignez mon apparence. Je marche un moment avant de rassembler quelques trucs ; un éclat de miroir, un seau d’eau plus ou moins propre et des morceaux de linges empruntés sur un toit. Mon regard se porte sur mon visage ternis par la saleté. Je pris plusieurs minutes à me laver le corps en grande partie puis essaie de me vêtir correctement. Je ressemblais toujours à un pauvre roturier aux vêtements un peu élégant. Un bandage de tissus remplaçait mon cache-œil disparu depuis je ne sais quand. Allons trouver de quoi nous restaurer.


A cette heure-ci, les rares endroits ouverts étaient les pubs et autres bars famés. En même temps, je m’attendais à quoi dans les bas de la capitale. Je pénétra dans le premier quelque secondes après une silhouette que je ne pus apercevoir qu’une fois à l’intérieur de la bâtisse. L’odeur d’alcool, charbon et vieux tabac me parvint aussi rapidement que le brouhaha ambiant. Une petit voix domine un peu le bruit tandis qu’elle hèle le barman en quête d’un téléphone. Mes yeux se posèrent sur la demoiselle qui parlait. Au vu de sa dégaigne et de la peur qu’elle dégageait en ce lieu, elle devait surement être une petite noblaille perdue pour une quelconque raison. Une idée me vint et cela pourrait m’occuper un petit moment de la nuit. Je m’approche d’elle, ayant l’air inquiet :


Je lui tend une main en lui souriant légèrement. Espérons qu’elle comprenne le truc. Parce qu’au vu des regards que la majorité lui lançaient, elle risquerai de passer une nuit dont sa vertu préférait éviter, je pense.

Alors à ce moment là, une des choses que je redoutais le plus se produisit, quelqu'un m'adressa la parole (les autres étant de me faire tuer, violer ou violenter). Je me retournais, j'étais effrayé. C'était un homme très grand. Il n'avait pas l'air bien riche, néanmoins, il était un minimum élégant. Il s'approcha de moi, je reculai d'un pas, et me dit d'un air inquiet:

- Mademoiselle, quel bonheur de vous voir en vie. Monsieur m’a mandé vous chercher à travers ces rues. Venez avec moi, on va rentrer

Je le dévisageais pendant quelques secondes, les sourcils froncés. J'étais méfiant. Il me souriait. Pouvais-je lui faire confiance ? Il avait plus de prestance que les autres hommes de cette pièce. J'avais le choix. Soit j'acceptais de le suivre lui, qui avait l'air plus fréquentable que les autres, quitte à prendre le risque qu'il me fasse des "choses". Soit je restais ici avec ces autres hommes qui étaient ce qu'ils étaient: des moins que rien. Mon choix était vite fait. Mieux vaut se faire agresser par une seule personne qui avait l'air relativement charmante et fréquentable que par plusieurs personnes qui l'étaient certainement pas.

J'acquiesçai et lui pris la main. Je tremblais.

- O-oui... Rentrons.

- Au r'voir m'zelle ! Ton p'tit fiancé doit t'attendre, c'p'tit veinard ! me dit le barman derrière mon dos.

J'entendais les autres rire. Je regardais autour de moi. J'avais envie de partir... J'entendis un commentaire que je trouvais tellement obscène que je me serais passé d'entendre. Je voulais vraiment partir. Au plus vite. Loin d'ici. Je tournais mon regard vers le jeune homme qui semblait vouloir m'aider.

Je fis volte-face vers le barman après la remarque et lâcha sans aucune émotion :

- Monsieur, son père, passera dans quelques jours réglés les consommations de mademoiselle et quelques petits détails.

La menace avait emprunt ma voix à la fin. L’homme baissa les yeux en murmurant une faible excuse. La salle était à présent dans le silence le plus absolu. Je sortis en tenant la main de la frêle demoiselle. Une fois à quelques mètres du bar, je souffle amusé :
Je nous guidait lentement vers des ruelles sombres puis éclairées, remontant vers les quartiers riches de la ville. Mon œil valide se tournis vers l’enfant – c’en était clairement un, 10- 12 ans si ce n’est plus- pour le détailler. Elle deviendra sûrement une belle jeune femme plus tard mais là, elle semblait partager entre la peur et le soulagement. Je m’arrêtai soudainement et me mis face à elle. Faisant usage de l’étiquette, je m’inclina devant elle :

Le jeune homme se retourna et dit au barman:

- Monsieur, son père, passera dans quelques jours régler les consommations de mademoiselle et quelques petits détails.

A la fin de sa phrase, son ton était menaçant. Cela me faisait un peu froid dans le dos. Le barman baissa la tête et s'excusa d'une petite voix. Le bar était silencieux, plus personne n'osait parler. Sur ce, nous sortîmes. Il me tenait la main. J'étais habitué à cela, tout bon gentleman tenait la main des femmes. Mais le fait que ça soit un parfait inconnu dans un tel lieu me mettait quelque peu mal à l'aise.
Quand nous nous étions éloignés du bar de quelques mètres, il me dit:

- Pendant un instant, j’ai cru que vous alliez refusée de me suivre, ce qui aurait brisé mon mensonge. Mais bon, c’est derrière nous à présent.

Je ne fis aucun commentaire. Je me demandais pourquoi il avait fait ça. Personne d'autre ne l'aurait fait. Je ne l'aurais pas fait moi. Je fronçais les sourcils. De plus, qui était-il ? Au fond, peu importait. Il m'avait sorti du mauvais pas et je lui devais une fière chandelle. Donc je ne m'offusquais pas de ne pas savoir son identité.
Il traversait les rues, tournait et se dirigeait comme s'il connaissait Londres sur le bout des doigts. Je me laissais guider. Je n'avais pas envie de me perdre à nouveau. Plus on marchait, plus on s'approchait des quartiers riches, plus j'étais rassuré.
Il s'arrêta soudainement et se tourna vers moi et eut enfin la décence de se présenter (en respectant l'étiquette):

- Excusez moi mademoiselle. Je me présente, Grent Geinmiin, humble majordome. Puis-je avoir connaissance de votre nom et des raisons de votre présence dans ces quartiers malfamé ?

Respectant à mon tour l'étiquette, j'inclinais légèrement la tête avant de me présenter:

- Je m'appelle Charlie R-... Je m'appelle Charlie. Enchantée.

Il ne m'a pas paru prudent de révéler mon nom. Je n'avais pas encore une entière confiance en lui et je ne voulais pas prendre de risque. Le fait de ne pas être un malotru ne l'excluait pas d'être quelqu'un de potentiellement dangereux.

- Eh bien c'est une longue histoire que je ne me sens pas capable de développer dans l'immédiat. Je me suis juste perdue, expliquai-je avec toute la courtoisie dont devait faire preuve une jeune Lady.

J'avais l'air beaucoup plus digne que dans ces quartiers malfamés. Je gardais la tête haute, j'avais même un petit sourire courtois aux coins des lèvres. J'étais plus à mon aise.

- En tout cas, je vous remercie de m'avoir sauvée de ce mauvais pied. Il y a-t-il un moyen pour vous remercier ?

Elle semble un peu plus à l’aise à présent. Même si elle ressemble toujours à une petite proie perdue au milieu d’une forêt. Délicieuse petite proie. Je fermis un instant les yeux pour chasser cette sauvage pensée. Ce genre de chose m’arrivais de temps à autre. La demoiselle répondit enfin à mes questions, enfin plus ou moins. Je trouvais étrange qu’elle porte un prénom à consonance masculine mais ne dit rien sur cela. Elle m’expliqua rapidement qu’elle s’était perdue. Quel inconscient laisser une demoiselle seule à Londres ? Que cela la nuit ou le jour mais bref passons. Quand elle me proposa rémunération, je me décida à répondre :


La jeune anglaise m’indiqua sa demeure et la demande que je fis à un passant me permis de trouver le lieu. Je repris le chemin avec la blondinette et lui demande finalement :


On arrivais dans un coin de Londres dont je ne connaissais les habitants que de réputations : la noblesse et les riches. Des gens dans un snob sans bornes pour la majorité mais aussi les rares personnes capables de m’employer. Mon œil vira au bleu foncé

Alors qu'il me demandait où j'habitais, je lui répondais. De toute façon, je n'allais pas réussir à rentrer tout seul. Je le trouvais très courtois. Il demanda à un passant le chemin et nous nous mîmes en route. Durant le trajet, il me demanda, pour remerciement, le gîte et le couvert. Je ne savais pas si je devais accepter. J'avais trop de chose à cacher. Que ferais-je s'il découvrait ma véritable identité ? Mais d'un côté, je ne pouvais pas refuser après le grand service qu'il m'avait rendu.

- Le gîte et le couvert ? Cela me convient. Néanmoins, je ne suis pas certaine que ma mère accepte. Il faudrait que je lui en parle.

Nous arrivâmes chez moi. C'était un très grand manoir de ville à l'architecture inspirée de celle du château de Versailles. Je montai les marches du perron en soulevant légèrement ma robe pour ne pas me prendre les pieds dedans. Puis je toquai à la porte. On vint rapidement m'ouvrir.
Nous fûmes accueillis par la gouvernante, Paulette. C'était une femme d'âge mûr. D'âge très mûr même. A titre indicatif, c'était elle qui était chargée de l'éducation de mon père et de ma tante. Elle était encore jeune à l'époque. Elle était très stricte.
Elle vit directement que j'étais accompagnée.

- Mademoiselle !! Où étiez-vous ?! Votre mère se faisait un sang d'encre de ne pas vous voir revenir de votre dîner !!

- Je suis désolée Paulette... J'ai eu quelques soucis en chemin... Mais cet homme m'a aimablement raccompagné jusqu'ici.

Je cherchais à ne pas me faire gronder trop sévèrement. De toute façon je savais que temps qu'il y aurait un invité, je n'allais pas trop me faire sermonner sévèrement.
Alors que Paulette était entrain de nous faire entrer et nous aidait à nous dévêtir en me sermonnant, je vis ma mère descendre les grands escaliers de marbre recouvert d'un tapis foncé. J'habitais dans un lieu pour le moins luxueux.

- Paulette, ça suffit. Je pense qu'elle a compris.

Elle s'approcha de moi et du jeune homme puis m'interrogea du regard.

- Mère, je vous présente Grent Geinmiin. Cet homme a eu la gentillesse de m'aider à retrouver mon chemin alors que j'étais perdue. En remerciement, j'aimerais qu'on lui offre le gîte et le couvert.

Ma mère regarda attentivement Grent. Elle avait un visage doux et je n'y lisais aucune colère.

- Bien. Si tu le désires.

Je remerciais ma mère. Ce n'était pas vraiment un soulagement. J'allais devoir être vigilent.

Je le suivit quand on passa l’imposant portail en fer d’une demeure qui ne ressemblais nullement à ses voisines ; surtout au niveau du jardin. Tout sortes de formes géométriques et perspectives apparaissaient dans la pénombre. Si mes petites connaissances en jardin ne sont pas fausses, je crois qu’on appelle cela un jardin « à la Française ». M’attardant pas plus que cela, je suivis de près la demoiselle qui toqua à la porte. Une dame à l’âge déjà plus qu’avancé, l’accueillit par des sermons que je n’écouta pas, occupé à fixer le reste de la demeure luxueuse derrière moi. C’était la première fois que je visitais ce genre de demeure. Je défit mon manteau, finissant dans mon ensemble veston noir, chemise blanche et pantalon noir des plus usées. Je regardais l’heure sur ma montre. Je devrais sûrement la remonter à l’occasion.

Une voix à la fois douce et autoritaire résonna dans la pièce. Elle prévenait d’une femme au visage peu marqué par le temps et à un maintien impeccable. Surement la maitresse de maison. Je fit une légère révérence après avoir été présenté. Un sourire naquit sur mes lèvres quand la mère accepta. Ce soir marquait vraiment un tournant dans mon existence, enfin espérons. Je me tournis vers la demoiselle et souffla :

- A présent, je vous suit.

Je ne ressemblais pas beaucoup à ma mère, je ressemblais plus à mon père. Grent fit preuve de beaucoup de politesse. Je n'en attendais pas moins.

- Charlie, tu installes Monsieur dans la chambre d'ami ? C'est ton invité après tout.

- Oui mère.

Je lui fis une révérence. Je n'agissais pas du tout comme ça avec ma mère au quotidien. Je le faisais que quand il y avait une personne extérieure. Sinon, je ne faisais pas tant de manière. Je la tutoyais, je lui faisais la bise le matin et il m'arrivait parfois d'être insolent.
Je montai les grands escaliers et marchai jusqu'à la chambre d'ami. Quelques tableaux habillaient les murs. Notamment les peintures de tout les chefs de maison de la famille Rozen.
On entra dans la chambre. Une domestique était entrain de faire les poussières. Elle devait avoir environ 20 ans. Pour tout dire, je vivais entouré de femme. Entre ma mère, la gouvernante et la domestique... Il y avait juste un jardinier mais je ne parlais pas beaucoup avec.
La domestique me fit une révérence en me souhaitant bonsoir à moi et à Grent et s'éclipsa rapidement.
Je me tournais vers Grent.

- Votre chambre est ici.

Je souriais courtoisement. La pièce était décorée à la Française. Les origines françaises de ma famille étaient très présentes.

Je suivis la demoiselle de très après que sa mère lui désigna ma chambre ; on monta des escaliers, marcha dans de longs couloirs avant d’arriver à la pièce en question. Helvítis ! sa demeure pourrais loger tellement de gens. Malgré cela, je ne sens la présence que de quatre ou cinq personnes dans la demeure. Sûrement une facétie des grands de ce monde, comme disait feu mon professeur. Mon regard se perdit aussi rapidement dans le faste des décoration. Quand la domestique pris congé, je la salua avec une légère référence puis entra dans la pièce. Comme pour le reste de la maison, elle était aussi richement décorée que grande. Je fis un tour complet et revint vers la demoiselle :

- C’est grand…personne d’autre vis dans cette pièce ?

Ce fut la seule chose que je parvins à dire concernant sa demeure. Mais je la résumais parfaitement dans mon esprit : Grande, décoré, vide, froide. Comment peut-on vivre ainsi ? Je fixa à nouveau les deux lagons qu’étaient ses yeux. Ma voix se fit douce et calme :

- Il auriez un lieu où je pourrais me laver afin d’être plus présentable ?

Le jeune homme fit un tour complet autour de la chambre et me demanda si personne d'autre ne vivait dans cette pièce. Cette pièce avait toujours été la chambre d'ami mais il y avait tellement d'autres pièces dans cette maison autrefois pleine de vie.
Il me regarda dans les yeux, pour une raison qui m'échappait et me demanda où il pouvait se laver. Je lui répondis en sortant de la chambre et me dirigeant vers la salle de bain.

- Bien sûr. La salle de bain est au fond du couloir à gauche. Vous demanderez à Stacey de vous faire couler votre bain.

J'ouvris la porte de la salle de bain qui avait été récemment entièrement refaite, l'ancienne commençant à dater.

- Si vous n'avez plus besoin de moi et si cela ne vous importune pas, je vais aller me mettre dans une tenue un peu plus confortable. Vous demanderez encore à Stacey pour votre repas.

Mon corset commençait sérieusement à me faire mal au dos mais je continuais de sourire même si je pense que cela commençait à se voir.

Je pris notes mentalement de ses indications ; malgré que je me soit débarbouiller tout à l’heure, il reste beaucoup trop de saleté sur moi et puis, j’aimerai changé de forme pour pouvoir me detendre. Je fais avoir besoin d’une grande pièce pour cette fois. Ce serais la seule utilité que semblait avoir cette demeure. J’eus un petit sourire caché avant de fixer la demoiselle qui semblait bizarre tandis qu’elle m’informa qu’elle devait se changer. Son regard trahissait une certaine douleur. Je m’inclinais pour pouvoir être à sa hauteur et lui demanda :

- Tout vas bien ?

La demoiselle ne me répondis pas vraiment, préférant user de la politesse et l’étiquette pour me laisser seul avec ma question. J’eus un léger soupire puis me rendit à la salle d’eau. Sur place et comme prévu, je trouvais Stacey, la domestique, qui me fit couler un bain puis me laissa seul, après m’avoir expliquer où tout le nécessaire de toilette se trouva. Je retirais pour la première fois depuis longtemps, l’ensemble de mes vêtements avant de me glisser dans une eau brulante et parfumée. Elle vira au terne en un instant. Je passa plusieurs dizaines de minutes à frotter mon corps, retirant les couches de crasses et de sang logés dessus. Quand j’eus terminé, Je sortis de l’eau et déploya le reste de ma forme pour m’étirer et faire craquer ma musculature. Certains de mes membres étaient restés immobiles trop longtemps et les bouger me fit aussi bien mal que plaisir.

Je quitta la pièce, vêtu d’un pantalon noir et d’une chemise bleu clair –prêt de la famille- et chercha la servante pour qu’elle me guide vers la salle à manger. Je patienta un moment seul avant d’être rejoint par mon hôtesse.

Le jeune homme me demanda si j'allais bien. Je lui répondis vaguement en acquiesçant puis m'éclipsai rapidement. Je me dirigeais vers ma chambre et dès que j'eus fermé la porte, j'appelais Paulette d'une façon peu discrète (j'espérais que mon hôte ne m'entendait pas) pour m'aider à me déshabiller. Elle vint rapidement et m'aida à me défaire de ma robe et de mes sous-vêtements en me parlant de choses anodines. Je poussai un soupir de soulagement quand elle défit mon corset.

J'étais à présent nu. Je me mirais dans le miroir à pied. J'avais un corps imberbe et une silhouette très fine. Je pense que j'étais dans la norme pour un garçon de mon âge mais je me trouvais maigrichon et faible. Et c'était sûrement le cas.
Je passai une longue robe de nuit destinée aux femmes. Je n'avais pas enlever mes extensions, je m'étais juste décoiffé. Je devais encore avoir l'air d'une jeune fille. Ensuite, j'enfilai une robe de chambre rose pâle qui appartenait à mère (elle était un peu trop longue). Je me regardai une dernière fois dans le miroir. Il n'allait se douter de rien comme ça.

Je sortis de ma chambre et descendis les escaliers. J'allais à la salle à manger où mon invité m'y attendais patiemment.

- Désolée d'avoir été si longue. Vous savez, cela prend du temps d'enlever toutes ces couches de vêtements.

J'adoptais un air navré. Je m'assis à la table alors que Stacey m'avait reculé la chaise. Je la remerciai d'un mouvement de tête. Je me tenais parfaitement droit sur ma chaise, c'était un peu difficile. Il y eut un grand silence qui commençait à me rendre mal à l'aise. Une bonne maîtresse de maison se devait d'éviter ce genre de situation.

- Alors, vous êtes majordome ?

Je m’assis sur une grande table en bois brut. La teinte du bois et les stries me font pensé à du chêne ; encore un truc inutile que mon professeur m’avait appris. Un sourire me pris et je reporta mon attention sur la demoiselle. Elle semblais plus beaucoup à l’aise à présent, sans toutes les parures de sa tenue. Celle qu’elle portait actuellement était une longe robe rose pâle qui lui allait au teinte. Ses cheveux blonds encadraient son visage fin et délicat. Seul ombre au tableau selon moi, c’était ses épaules un peu trop carré pour une demoiselle, surtout à son âge. Sa voix douce résonna dans la pièce pour me poser une question :

- Alors, vous êtes majordome ?

Un sourire calme apparu sur mes lèvre tandis que je remettait en place mon bandage qui me servait de cache-œil. Je répondis simplement :

- Effectivement, mais pour l’heure, je n’ai aucune personne à servir. Pourquoi cela ?

Stacey arriva enfin avec le repas ; il s’agit d’un repas assez simple : Rosbeef avec une sauce aux champignons accompagné d’une julienne de légumes de saisons. J’attendis que la demoiselle commença pour manger.

Je regardais l'assiette que Stacey déposa en face de moi. Je n'avais pas faim mais je me forçais pour en prendre une bouchée. C'était un plat ordinaire. En mâchant mon morceau de viande, j'écoutais mon invité. J'avalais difficilement ma bouchée (j'ai toujours eu du mal à avaler les bouts de viandes) avant de lui répondre.

- Je m'étonnais de ne pas vous entendre faire des allusions à votre maître. Enfin je veux dire, un majordome n'est-il pas sensé être le bras droit de son maître ?

Je coupais un nouveau morceau de viande. Donc il n'avait pas de travail... Je supposais que cela lui arrivait régulièrement de venir en aide à des personnes pour se faire offrir le gîte et le couvert. Ah misère quand tu nous tiens !

- Je me rappelle, mon père avait un majordome, Philippe. Il accompagnait mon père partout où il allait. J'étais encore jeune mais j'ai encore quelques souvenirs.

Je racontais cela surtout pour meubler la conversation. J'étais sûr qu'il s'en fichait un peu. Je me demandais si je n'avais pas besoin d'un majordome ? Je me disais que ce devait être plaisant d'avoir un homme sous ses ordres.

Je mangeais à la suite de la demoiselle et avala rapidement le repas malgré tout l’étiquette dont je faisait preuve. C’était bon mais sans plus ; cela me faut pas certains petit plaisirs que j’ai déjà pu goûter par moment. La demoiselle parlait pour ne rien dire de vraiment significatif ; surement une habitude apprise part une gouvernante. Je l’observais attentivement quand elle parla du majordome de son père. Effectivement, un majordome était à la fois un bras droit, un conseiller, un garde du corps, tailleur, cuisinier et bien d’autres pour son maître. Moi, j’avais aussi fait office de lame dans mon premier travail. Une idée germa dans mon esprit et je la laissa s’exprimer à haute voix :

- Désiriez- vous m’engager à votre service ?

C’était sorti rapidement et sans hésitation car je devais m’occuper un peu l’esprit par autres choses que mes spectres. Et puis servir cette jeune femme ne devait surement pas être difficile. Faut juste la ramener chez elle quand elle sort. Mon œil bleu glace se figea dans les siens en attente de sa réponse

Je ne fus pas étonné de sa demande. Je le regardais silencieusement pendant de longues secondes. Je me demandais si je devais accepter. Ma mère allait-elle être d'accord ? Bon. En vérité, ma décision était déjà prise. Je voulais juste me donner et lui donner l'illusion que je réfléchissais à sa demande. Après tout, c'était moi l'homme de la maison Rozen.

- Très bien.

Je parlais toujours avec ma voix de fille. Je posai mes couverts et me levai sans finir mon assiette. J'avais un visage neutre. Je me dirigeais vers la porte puis me retournai.

- Demain, 8h30 sans faute pour le réveil. Sur ce, je vais me coucher. Il se fait tard pour une jeune lady. Bonne nuit et à demain.

Je sortis de la pièce et alla dans ma chambre. Dès je fus entré, Paulette entra à son tour.

- Monsieur ?! Que faites vous là ?! Et votre mère ?! Qu'en penserait-elle ?!

- C'est bon, Paulette. Tu n'as rien à dire. Aide moi à retirer mes extensions.

J'enlevais tout mes vêtements et mis une chemise de nuit plus masculine. Paulette me retira mes extensions en me sermonnant en marmonnant.

Je resta un moment sur place en entendant sa réponse. Malgré sa voix délicate, l’autorité impériale d’une chef de maison se faisait entendre. Nul doute que j’étais engagé à présent. Un souris s’étira le long de mes lèvres tandis que Stacey débarrassa la table. Me redressant, je lui fit par de la situation et lui demanda divers objets qui allais mettre nécessaire pour cette soirée qui commençait tout juste pour moi. Minuit moins un affichait l’horloge de la pièce. La petite Charlie devait être épuisée à cet heure.

Je m’étirais longuement et commençais à travailler sur mes effets pour leur rendre un peu de prestance. Stacey m’avait bien aidée en m’emmenant tout et me faisant visité le manoir de la famille Rozen. Au moins, je connais leur nom de famille. J’appris aussi quelques petites manies qu’avait la demoiselle. Je pris divers notes sur cela pour plus tard. Je travailla d’arrache-pied pour pouvoir me présenter devant elle sous un meilleur jour. J’eus même le temps de faire un nouveau cache-œil pour remplacer les bandages.

Aux alentours de huit heures et après une heure de sommeil nécessaire, je pris la direction de la cuisine pour préparer un petit déjeuner convenable pour la demoiselle : fruits de saisons, viennoiseries, divers choix de thés ainsi qu’un verre de jus orange pressé à la main. A l’heure indiquée, je me rend devant la chambre et toque avant d’entrer dans la pièce, plateau en main

En entendant la porte toquer le lendemain, je grognais, le visage dans mon oreiller. Je n'aimais pas le matin. Je n'étais pas une personne matinale. Pas du tout même.
J'étais presque complètement sous ma couverture. J'avais souvent froid la nuit. Je tournais ma tête vers mon nouveau majordome et le regardait d'un oeil. Tenue et prestance impeccable. Je n'avais rien à dire. Mais j'avais bien l'attention de le mettre à l'épreuve.
Je grognais à nouveau et je lui tournais le dos. Je ne cherchais pas à être aimable. Donc je ne l'étais pas. Je n'avais pas envie de me lever. Je ne pense pas qu'il ait tout de suite remarqué que ce n'était pas une fille qui occupait ce lit.

- Il est déjà l'heure ?

Ma voix était étouffée par le tissus de la taie d'oreiller. J'étais étalé sur le ventre comme un crêpe sous ma couverture. Je me redressais en grognant d'une manière qui était certainement peu élégante. Je n'avais plus mes extensions: mes cheveux étaient courts.

Je souriais comme à mon habitude en entrant dans la pièce pour déposer le plateau sur sa table de chevets. Profitant qu’elle regardais ailleurs, je glissais sur quelques mètres pour traverser la salle sans bruit. Mes mains se saisirent des grands pans de rideaux que j’ouvris. Le soleil darda quelques rayons à travers l’épaisse masse de nuages puis à travers la grande fenêtre pour venir éclairer et réchauffer la pièce. J’en profitais pour observer un peu les environs de la demeure. Au loin, je crus apercevoir le clocher de Saint-Paul. La demoiselle râla à moitié dans ses draps. Je me retournais pour lui répondre :

- Comme convenu, il est huit…

Ma voix se coupa net quand je vit un jeune homme dans la chambre. Non, dans le lit de la demoiselle. Malgré le jeune âge qu’il présenta, je n’hésitai aucunement. D’un geste preste, je pris la lame cachée dans la doublure de mon veston et fonça vers lui. Le plus dur fut de résister à l’appel du sang qui battait mes tempes, mais aussi de réduire ma vitesse à celle d’un humain. Ma lame se logea sous sa gorge tandis que je darda mon regard vers lui :

- Où est Charlie ?

[HRP : J’ai eu un fou rire en écrivant cela ]

Je fus aveuglé par le rai de lumière qui pénétrait dans la chambre. Je râlai encore une fois. Il se retourna vers moi en me confirmant l'heure et il s'arrêta net de parler. Il fonça sur moi en sortant une arme blanche qu'il me planta sous la gorge. Je restai calme. Très calme. Et me demanda où était Charlie. Je le regardais droit dans les yeux de mon air le plus hautain. Je parlai avec autorité.

- Lâchez moi. C'est quoi ces manière ? Est-ce comme cela que l'on traite son maître ? Quel piètre majordome vous faites dans ce cas.

Je restai très calme. Au fond, cela m'amusait mais je ne le montrais pas.

- Dès le matin en plus...

C'était le genre de chose, en temps normal, qui m'aurait mis de très mauvaise humeur. Déjà que j'étais difficilement supportable quand j'étais de bonne humeur (tout est relatif)... Je détestais le matin.

Quand il m’annonce la couleur, j’hésita longuement sur la démarche à suivre. Ma nature me susurrait l’idée de l’éventrer sur place pour savoir son véritable genre. L’idée était tentante, très tentante. Je fit disparaître la lame aussi vite que je l’avais sorti et me redressa de toute ma hauteur. Mon regard le scruta attentivement. Effectivement, c’était bien Charlie, même trait même corps fin avec les épaules quelques peu carré. Ainsi, il se travestissait pour une quelconque lubie de noble. J’émis un léger soupire et repris ma contenance tandis que mon œil bleu transparent vira au bleu électrique. Je fit un plus grand effort pour rattacher mes pulsions au fond de mon esprit. Faudrait que je fasse quelque chose pour cela bientôt. Je pris son plateau et lui présenta :


Je me plaça droit face à lui, réfléchissant à une manière de lui rendre la pareil. Je sens que ce travail va être d’une difficulté que je n’avais pas soupçonné.

Je m'asseyais tranquillement sur le bord du lit. Je n'avais sur moi que ma chemise de nuit qui m'arrivait aux mi-cuisse. Je ne répondis pas immédiatement à sa question et buvais une tasse de thé.

- Un thé pour le réveil me suffit. Je ne mange qu'une fois habillé. Je ne prends mon petit déjeuner au lit que quand je suis malade.

Je finis ma tasse de thé et la posai sur le plateau.

- N'êtes vous pas sensé connaître vous-même le programme de ma journée ?

Il n'y avait pas l'ombre d'un sourire sur mon visage. Mon ton de voix était cassant. Je savais ce que j'avais à faire aujourd'hui, mais il devait le savoir aussi. Une des fonctions d'un majordome est d'organiser les sorties et rendez-vous de son maître. Je n'avais rien de prévu pour aujourd'hui, Jack devait juste venir me donner un cours de danse et un cours de piano. Donc je n'avais pas besoin de revêtir des vêtements de fille.

Profitant qu’il se plaignait déjà dès le matin, j’en profitai pour aller vers la porte pour verrouiller la porte à clé avant d’aller vers lui, en gardant le plus grand calme. Je me plaça en suite, en face de lui, l’air détaché :

- Bien. On va reprendre depuis le début, toi et moi car tu ne sembles pas avoir compris certains points. Je vais tâcher de t’expliquer cela le plus simplement possible pour que tu mémorise tous. Je suis certes à tes ordres mais je ne suis ni ton esclave ni ton larbin. Et qu'à tout moment, je peux retournais d'où je viens sans problème

Le jeune resta aussi calmement que depuis le début de notre discussion. Il n’oscilla nullement et ne dis rien. Je continua donc mes explications :

- Bien, on reprend simplement. Concernant vos habitudes, j’aimerais que tu me les listes afin de pas avoir à éviter de perdre du temps ainsi.

Je me recula de lui et repris un masque impassible et souriant. Seul défaut était mon œil quasi-blanc à présent. J’émis un léger sourire poli et déclara simplement :

- En dehors de votre cour du jour, vous désirez peut-être faire autre chose qu’être enfermé ici ?

Je l'écoutais calmement. Il régla quelques point concernant sa servitude. Il n'était pas mon larbin ? Très bien. C'est ce qu'on allait voir. Il me demanda ensuite de lister mes habitudes. Bien. J'allais le faire. J'étais coopératif. Puis il me demanda si je ne voulais pas sortir aujourd'hui après s'être redressé. Je regardais son oeil blanc. Cet oeil était très étrange. Mais je fis mine de rien.

- Non.

Je ne voulais pas sortir aujourd'hui. J'avais mal au dos à cause du corset et je n'en avais pas envie.

- Déjà, je ne t'ai jamais permis de me tutoyer. Donc à l'avenir le "vous" sera de vigueur. Concernant mes habitudes... Levé: 8h30 avec un thé, on m'habille et je vais prendre mon petit-déjeuné. Si vois quelqu'un extérieur au cercle familiale et des domestiques, tu m'habilles comme une fille et au cas contraire comme un garçon. Ensuite, les activités du matin sont souvent des cours. Je mange à 12h30. Je n'aime pas les fruits de mer, les plats épicés, les légumes verts à part les brocolis, les endives, les clémentines, les pommes de terre à l'eau, les fromages malodorants et quelques autres choses. Le repas se finit avec un thé. Après, c'est les activités de l'après-midi, souvent consacré à quelques cours et aux loisirs. L'heure du thé: 4h avec une douceur. Puis le dîner, normalement, si je n'ai pas de sortie prévue, c'est 20h30 et il se finit avec un thé. Je fais ma toilette aux environs de 21h. Et le couvre feu est quand cela me chante.

Ce n'était pas vraiment vrai pour le dernier point. En tout cas, j'avais une vie bien réglée. J'avais toujours vécu ainsi. Je le regardai sans sourire.

- Maintenant habille moi. S'il te plait.

J'insistais sur le "s'il te plait" pour montrer que je ne le traitais pas vraiment comme un esclave. Enfin, en tout cas, pour qu'il en ait pas trop l'impression.